Méthode : réinterroger l'image de la métropole à travers la presse nationale quotidienne
Nous fondons nos analyses sur 9 500 articles de presse issus aussi bien de la presse généraliste (Le Monde, Le Figaro, Libération), qu'économique (Les Échos, les Acteurs de l'économie) française et aussi anglophone. Nous avons analysé ce corpus à l'aide du logiciel libre Iramuteq pour faire émerger les thématiques principales contenues dans ces articles parlant de la métropole de Grenoble. Cette analyse a été menée sur la période 1945 - 2020, puis par mandat politique. À titre de comparaison, nous avons effectué la même analyse sur la Métropole de Rennes (9 000 articles).
Des points communs dans la manière dont sont perçues les métropoles
Il existe des thèmes communs et des régularités dans la manière de parler d’une métropole comme la politique, la culture ou la justice. Nous percevons aussi des spécificités à chaque métropole : pour Rennes, il s'agit d'une image de ville sportive (via le football), la forte présence de l'économie locale. La présence d'une classe de mots autour des grèves étudiantes et syndicales est aussi spécifique. Grenoble se distingue quant à elle, par la recherche scientifique, la violence urbaine et la montagne. Nous avons alors cherché comment ces images ont émergé puis évolué au travers d'un découpage par mandat politique sur la période 1945 - 2020.
L'émergence spécifique d'images-clichés
Pour la métropole grenobloise, la recherche scientifique est un marqueur territorial grâce à la visibilité médiatique des instituts de recherche locaux, des universités et grandes écoles du supérieur. Cette image évolue depuis 1945 avec un glissement progressif de la recherche industrielle vers la recherche universitaire. L'ensemble des activités de recherche a donc bien un rayonnement national et international, et confère une identité particulière à la métropole depuis les années 1950.
Grenoble a aussi une image de "métropole de montagne" qui a plus de poids dans les médias anglophones que français. Les massifs, le climat, l'altitude et bien évidemment le ski sont évoqués. Ce sont essentiellement les stations et le sport d'hiver qui portent cette image avec entre autres la visibilité des JO de 1968 et 1992. En France, cette image s’est fortement estompée depuis la fin des années 1990.
L'insécurité est aussi une image associée à Grenoble dans la presse française seulement. Au travers des mandats politiques, nous observons que la discussion sur l’insécurité à Grenoble se détache progressivement de faits divers et s’oriente vers des généralités sur la violence urbaine, les banlieues, etc. Nous analysons ainsi un effet stigmatisant du "discours de Grenoble" de N. Sarkozy en 2010, avec une recrudescence du nombre d'articles sur le sujet après cette date. L'essentiel de ces articles sont publiés dans des médias orientés politiquement à droite.
L’image d’une "ville polluée" ne ressort pas en revanche dans les médias nationaux ou internationaux, contrairement à un cliché partagé localement.
L'analyse textuelle au service de la construction métropolitaine ?
L’analyse des médias permet de questionner la manière dont un territoire est perçu dans le temps en faisant émerger des stigmas et des images-clichés. L'analyse textuelle montre comment ces images se construisent en soulignant les acteurs, les structures ou encore les évènements qui sont déterminants dans la construction de ces images. En cela, on peut déjà s’interroger sur les effets d’image de Grenoble Capitale Verte Européenne 2022.
Ce type d'analyse, ici appliquée à deux territoires, est réplicable à d'autres métropoles. Mobilisant peu de ressources, l'analyse textuelle permet ici aux acteurs (politiques, de la société civile, économiques) de comprendre les forces et faiblesses perçues du territoire et de travailler en conséquence sur son attractivité et sa résilience.