La métropole HOSPITALIÈRE

Flux et coopérations

Les complémentarités territoriales, levier d'hospitalité métropolitaine

Écrit par : Magali Talandier, professeure en urbanisme et aménagement du territoire, UGA/Pacte, et Isabelle André-Poyaud, ingénieur de recherche

Magali Talandier, directrice de la plateforme Popsu Grenoble
Magali Talandier, directrice de la plateforme Popsu Grenoble

Le mouvement général des mobilités résidentielles se structure autour de deux forces antagonistes. Les mobilités de longue distance seraient centripètes au profit des villes-centres, tandis que les mobilités de courte distance seraient centrifuges au profit des périphéries. En tant que porte d’entrée sur le territoire, la ville-centre impulserait la dynamique globale d’une aire métropolitaine.

L’analyse des complémentarités résidentielles


Cette représentation d’une ville-centre qui attire les nouveaux arrivants avant de les repousser vers les périphéries n’est pourtant pas systématique. Si l’on délaisse le seul prisme de l’attractivité pour interroger l’hospitalité de ces grandes régions urbaines, alors l’apport des périphéries est évident, en termes de flux, de stocks, et de diversité des profils accueillis. Des complémentarités résidentielles multiples, différentes selon les métropoles, apparaissent.

Notre analyse porte sur les flux migratoires entrants, sortants, mais aussi sur les stocks de la population qui ne bouge pas. On mesure donc les arrivants, les sortants, mais aussi les installés. Ces calculs sont réalisés pour l’ensemble des métropoles françaises, avec trois échelles imbriquées.

Tout d’abord, nous distinguons la ville-centre, puis les communes périurbaines situées dans la métropole et enfin, ce que nous appelons les communes péri-métropolitaines hors métropole, mais situées à moins de 50 km de la ville-centre.


Des configurations spatiales différenciées


Les résultats obtenus mettent en évidence des configurations spatiales différenciées.

En premier lieu, dans huit métropoles sur vingt-deux (soit plus d’un tiers), les volumes de nouveaux arrivants sont plus faibles dans la ville-centre que dans le périurbain (Paris, Bordeaux, Marseille), plus faibles dans la ville-centre que dans le péri-métropolitain (Nice, Lille, Metz), voire même que dans ces deux types respectifs de périphéries (Rouen et Toulon). Pour ces huit métropoles, l’attractivité résidentielle de la région métropolitaine dépend d’abord des territoires non centraux.

Pour les quatorze autres, la situation est également plurielle.

À Grenoble, par exemple, ce sont les flux en provenance de l’étranger qui contribuent à l’attractivité de la ville-centre. La même analyse focalisée sur les flux uniquement infranationaux souligne l’attrait des communes péri-métropolitaines de la région grenobloise, plus attractives que le reste de l’espace métropolitain. Ainsi, dans l’aire métropolitaine de Strasbourg, 60 % des nouveaux arrivants infranationaux s’installent dans la ville centre alors qu’ils ne sont que 35 % dans l’aire de Grenoble.

Enfin, si l’on raisonne non plus en termes d’attractivité mais d’hospitalité, en regardant la capacité des territoires à retenir leur population, le résultat bascule en faveur des périphéries. Ce sont cette fois les espaces périurbains et plus encore péri-métropolitains qui retiennent le plus les populations résidentes.


Des dynamiques territoriales mouvantes, un besoin de coopération renforcé


L’analyse de ces résultats sur le long terme montre que la dynamique et le rôle de chaque type de territoire peuvent être amenés à bouger au sein d’une même région urbaine. Selon que l’on est en période de crise, par exemple, ou en période de rebond, les centres et leurs hinterlands n’ont pas les mêmes capacités d’attractivité et d’hospitalité. De la même manière, l’attractivité respective de ces trois échelles de territoire varie selon les profils et les métropoles. Par exemple, un cadre sur deux qui arrive dans une aire métropolitaine s’installe dans la ville-centre, à Nice, ils ne sont qu’un sur trois.


Tous ces éléments confirment, si besoin était, l’importance de la coopération territoriale. Car ce sont ces spécialisations qui, prises et gérées isolément, peuvent accentuer les dynamiques de ségrégation, alors même qu’elles pourraient devenir les piliers d’une diversité revendiquée, assumée et garante d’une hospitalité métropolitaine.


voir le graphe Performance relative en termes d'attractivité des cadres voir la carte De l'attractivité à l'hospitalité